Lorsque Prosper Mérimée, célèbre inspecteur général des monuments historiques, pose ses valises en Bretagne, "il trouvait cela +nul+". "La seule chose qui l'intéressait, c'était les mégalithes", raconte M. Leloup.
Après la Seconde Guerre mondiale, "une prise de conscience s'opère" et des initiatives de classement sont lancées à Rouen, Rennes ou Strasbourg. Mais "si on avait suivi la logique urbanistique, tout aurait été détruit à Rennes, ce qui a été le cas pour Nantes ou Bordeaux", relève M. Leloup, ardent défenseur de ce patrimoine. En effet, ces édifices typiques de la noblesse d'Europe du Nord, qui trustent désormais les cartes postales normandes, alsaciennes ou tourangelles, sont associés au mal logement et fréquemment occupés par des étudiants désargentés.
A la fragilité du bâti -l'installation de gouttières et de conduits de descente, par exemple, ont fait pourrir le chêne-, s'ajoute le risque d'incendie: "un îlot à pans de bois qui n'aura pas fait l'objet de restauration a beaucoup plus de potentiel combustible qu'un immeuble aux murs en béton", constate Thierry Bonnier, directeur des sapeurs-pompiers dans le secteur sauvegardé de Rennes.
Conséquence: 39 incendies y ont été recensés, dont certains mortels, entre 2014 et 2017 et des trous béants sont visibles au coeur de la ville.
Potentiel économique
Restaurer ces maisons à pans de bois "coûte une fortune", reconnaît Daniel Leloup, "ça peut durer des années et il faut tout démonter". Ainsi, la capitale bretonne va débourser 21 millions d'euros d'ici 2023 en réhabilitation, après une première campagne de 17 millions entre 2011 et 2016. Mais ce patrimoine constitue "un potentiel économique", analyse M. Leloup. "On a commencé à réhabiliter les façades partiellement pour que les touristes aient de belles photos", ironise-t-il.
Boutiques, bars, restaurants... ont ainsi investi ces murs médiévaux et des villes comme Rouen et Strasbourg, qui en possèdent plus d'un millier, ont pris de l'avance par rapport à la capitale bretonne.