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Le Pr Alain Serrie* expose les avantages d’une nouvelle thérapie locale destinée aux résistants aux médicaments.
Quelle est la définition d’une douleur neuropathique périphérique ?
Pr Alain Serrie. Ces douleurs (pour 10 % de la population) concernent le système nerveux situé à la périphérie de l’organisme et non le système nerveux central (celui du cerveau et de la moelle épinière). La fonction des nerfs est celle d’un signal d’alarme qui envoie un message douloureux lors d’agressions diverses – traumatismes, zona, etc. En cas d’anomalie de ce processus, certaines substances sont alors sécrétées (histamine, sérotonine), qui irritent les fibres nerveuses conductives. Nous parlons alors d’une “soupe inflammatoire”, qui amplifie une douleur de façon excessive.
Comment s’assure-t-on précisément du diagnostic ?
Après un long interrogatoire et un examen clinique, nous utilisons un outil de dépistage très efficace, le DN 4 : le patient doit répondre à 10 questions très spécifiques. Quatre “oui” suffisent à établir un diagnostic en deux minutes.
Avec ce questionnaire, quels sont les symptômes qui vous alertent ?
Les patients atteints de neuropathie périphérique peuvent ressentir, selon les cas, des fourmillements, des picotements intenses, des décharges électriques, un fond douloureux type brûlure, une sensation de compression avec un engourdissement de la zone concernée. Ces symptômes ont des retentissements importants sur la qualité de vie : fatigue, anxiété, troubles du sommeil et dépression.
Quelles peuvent être les causes de ces douleurs ?
Elles sont nombreuses : les suites d’une opération, d’un AVC, d’une hémiplégie paraplégique, d’un traumatisme dû à un accident, un zona…
Actuellement, quels sont les traitements ?
La première approche, la plus fréquente, consiste à prescrire des antidépresseurs ou des antiépileptiques, à doses modérées. La seconde approche est non pharmacologique, comme la méthode de neurostimulation externe grâce à un petit appareil porté quatre à six heures par jour.
Quels résultats obtient-on avec cette prise en charge conventionnelle ?
Les médicaments ont des effets secondaires qui diffèrent selon les individus, et le port quotidien d’un appareil stimulateur peut se révéler très contraignant. Avec ces approches, l’intensité de la douleur peut diminuer de moitié chez 30 à 40 % des patients.
En quoi consiste la nouvelle méthode appliquée dans les centres antidouleur ?
Il s’agit d’un traitement médicamenteux prescrit en cas d’échec des thérapies classiques, extrait du piment rouge, la capsaïcine. La douleur étant transmise par des neurotransmetteurs, l’application d’un patch imbibé de cette substance libère les fibres nerveuses conductrices enflammées par les sécrétions excessives d’histamine et de sérotonine. En conséquence, la souffrance peut diminuer fortement.
Comment applique-t-on ce patch ?
Le médecin porte des gants spéciaux, et repère d’abord la zone douloureuse avec un marquage sur la peau qu’il recouvre d’un anesthésique local. Une heure après, il peut appliquer le patch. Durant trente minutes pour les atteintes au niveau des pieds, soixante pour les autres parties du corps. Ce traitement nécessite une hospitalisation d’une journée et peut être répété tous les quatre-vingt-dix jours.
Quelle est son efficacité ?
Elle a été évaluée par cinq études qui ont toutes mis en évidence une nette diminution de la douleur durant plusieurs mois et plus ou moins importante selon les patients. Dans les meilleurs cas, de 40 %.
En résumé, quels sont les avantages de ce patch ?
Pas de contrainte de prise quotidienne de médicament ou de port d’un appareil. 2. Absence d’effets secondaires. 3. Efficacité sur certaines douleurs rebelles. 4. Confort moral du patient car traité seulement “là où ça fait mal”.
Pr Alain Serrie - Chef du service de médecine de la douleur à l’hôpital Lariboisière
Source : http://www.parismatch.com/Actu/Sante/Douleurs-neuropathiques-Un-traitement-innovant-de-longue-duree-154689